François Piette

7 JUN 2005

Édito : de quel permis voulons‑nous ?

À partir du 5 septembre, les épreuves pour l’obtention des permis A, B, C et D seront modifiées. La partie théorique comprendra désormais 50 questions au lieu de 40. Les fautes graves ne se distingueront plus des autres, il suffira juste d’obtenir 41/50 pour pouvoir passer à l’examen pratique. Cette réforme découle d’une directive européenne visant à harmoniser les épreuves entre pays de l’U.E. Les futurs motards devront aussi réussir, dès cette date, de nouvelles manœuvres. Pas que le code D’après le Goca (Groupement des entreprises agréées de contrôle automobile et du permis de conduire), les nouvelles questions sortiront du cadre strict du code de la route. En effet, elles pourront aussi aborder la connaissance de règles de base de secourisme, les règles d'utilisation des véhicules pour respecter l'environnement ou des questions générales sur la mécanique automobile. Comme je l’ai déjà indiqué dans le forum, cette nouvelle façon d'examiner me semble intéressante car on responsabilise un peu le candidat en ne se focalisant pas uniquement sur la connaissance du code. Il est évident que le futur conducteur doit savoir vérifier la pression de ses pneus, faire ses niveaux, régler son siège convenablement, connaître les premiers gestes de secours en cas d'accident... Ce n'est pas une question d'élitisme, juste une meilleure connaissance de base requise avant obtention du permis. Il est bien fini le temps où pour avoir son permis, il suffisait de se présenter à son administration communale. Dangereux Par contre, il semble plus hasardeux de louer les nouveaux exercices programmés pour les candidats motard. Ceux-ci devront réussir un évitement d’urgence à 50 km/h. Un exercice tellement élémentaire que la plupart des moniteurs motos-écoles ont bien du mal à le réussir (voir à ce propos une lette ouverte déposée sur notre forum). Les centres de maîtrise ne l’apprennent même pas aux débutants. À quel jeu joue les autorités ? Certes, il importe que chaque conducteur puisse rester maître de son véhicule, mais tout ne s’acquiert pas du jour au lendemain ou après quelques heures d’écolage. De fait, pourquoi ne demande-t-on pas aussi aux candidats automobilistes ayant entre 500 et 5000 km au compteur à réussir un évitement à grande vitesse sur route mouillée ou à un routier d’empêcher son poids lourd de partir en ciseau ? Je ne vous dis pas les tonneaux, les voitures dans la glissière ou les moniteurs piquant un sprint pour ne pas se faire harponner par un véhicule en déroute. Et les simulateurs ? Quitte à évaluer sur ce genre d’exercice, pourquoi ne pas utiliser intelligemment la technologie via un simulateur. Au moins, on ne casse pas la figure. Ayant personnellement essayé un tel simulateur (une moto sur vérins hydrauliques avec écran géant), je peux vous assurer qu’on apprend à éviter certaines âneries. Et puis si on se couche c’est pour du faux. On pourrait alors reproduire des conditions extrêmes : neige, conduite de nuit, enfant qui traverse soudainement, voiture qui fait une manœuvre dangereuse, trou dans la chaussée… Tout candidat motard, automobiliste ou camionneur aurait là la possibilité de s’aguerrir et de montrer ses capacités d’analyse et de maîtrise sans risquer sa peau, celle des autres, sa carrosserie ou le tissu de sa toute nouvelle combinaison. Il serait bon aussi de motiver les jeunes conducteurs à se perfectionner dans des centres de maîtrise avec des incitants financiers et la promesse d’une police d’assurance à prime raisonnable. Lacunes fondamentales Il ne faut pas, par contre, faciliter la base théorique. Je sais : ce sera difficile pour certains, d'où l'importance de bien préparer les épreuves. En tout cas, j'ai été très surpris dernièrement lorsqu'un moniteur d'auto-école se plaignait de certaines questions « tordues » parce que le candidat devait faire la distinction entre « devoir » et « pouvoir » ! Pourtant c'est une nuance de base de la langue française qu'on apprend au premier cycle primaire... Ne pas connaître la différence entre le droit et le devoir est quand même grave ! C’est peut-être la conséquence d’un manque de discipline lors du parcours scolaire et/ou d’un manque de soutien éducatif. Toutefois à force d’acharnement et de motivation, il est possible de braver les pièges du questionnaire et du stress. On peut aussi se faire aider. Certains organismes sociaux et d’aides à l’embauche proposent d’ailleurs des cycles d’apprentissage pour le permis de conduire afin d’aider les personnes en difficulté d’apprentissage ou financière. Bonne nouvelle toutefois : même si on rate plusieurs fois son examen théorique, on n’est plus obligé de passer par une auto-école. Pour la vie ? Enfin, il convient de s’interroger sur la durée de vie du permis. Combien d’entre-nous réussirait un 41/50 à l’épreuve théorique, sans préparation, avec les seuls acquis de notre propre réussite et nos kilomètres ? On a le bagage de l’expérience, des milliers de km au compteur, mais que savons-nous encore du dépassement des trams, de la signalisation peu courante ou des distances à respecter pour le stationnement... Sans parler des modifications dans le code de la route depuis 5 ans, 10 ans, 15 ans voire 20 ans ou 30 ans… D’autant que tout le monde ne regarde pas Contact avant le foot le samedi en fin de soirée. Je ne suis pas partisan d’un examen régulier remettant en jeu le permis, mais plutôt d’un recyclage obligatoire tous les 5 ou 10 ans, organisé sous forme d’un séminaire d’une demi-journée de rappels et de perfectionnement. Histoire de rester au courant de l’évolution de la loi et de la technique ! © Olivier Duquesne Merci à Ghost le Fantôme pour la photo prise lors d’une journée d’initiation pour débutants organisée par le forum. P.-S. : vos commentaires sont toujours les bienvenus.
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