Bruno Wouters

28 OCT 2013

Essai longue durée (4): En pays d'Argonne!

Les semaines passent, l'Integra remplit parfaitement son office de commuter, aussi à l'aise sur l'autoroute qu'en ville et sur la route, elle prouve à suffisance la justesse de son concept. Dure à la tâche comme un scooter, elle offre une protection et une facilité de conduite que n'importe quelle moto lui enviera, tandis que son allonge sur autoroute et son comportement routier sur un parcours plus champêtre apportent un agrément que peu de scooters approchent. L'essai de la Ducati Hyperstrada et la promesse d'une balade avec des amis motards nous dessinent une randonnée qui nous mènera jusqu'aux rives du lac de Der, à l'ouest de Saint-Dizier. En dernière minute, nous décidons d'adjoindre à l'Hyperstrada et à la 1200GS de nos amis l'Integra, histoire de lui faire voir du paysage!

Nous nous retrouvons à Mons autour d'un petit déjeuner, avant de tracer vers Rocroi via Beaumont, Chimay et cul-des-Sarts. Petite pause sur la place de Rocroi, envahie par la fête foraine, puis nous reprenons la route touristique des fortifications en direction de Charleville-Mézières, que nous traversons rapidement pour nous éclater après Flize sur la D133 puis la D12, en suivant régulièrement la route Rimbaud Verlaine. Le parcours est un vrai régal, qui serpente dans le massif ardennais. Nous traversons la forêt d'Elan pour marquer une petite pause aux abords des ruines spectaculaires du château de la Cassine. C'était le baptême du feu pour notre Integra. Celle-ci nous avait déjà prouvé ses aptitudes au commuting, et c'était bien le minimum pour ce type d'engin! Elle nous avait démontré aussi son aptitude au voyage en nous emmenant en duo à Londres avec armes et bagages. Cette fois-ci, nous voulions l'éprouver en mode "arsouille entre copains" sur les petites routes "qui le font bien".

 Mode "Arsouille"

Ici encore, pari gagné pour l'improbable mutante! Le modeste 670 cc a beau se contenter de 52 ch au régime paisible de 6250 trs/min, ça ne l'empêche pas de faire preuve d'un certain tempérament. Nous abandonnons rapidement le mode "D" pour le mode Sport, plus réactif et plus adapté au rythme imprimé par le groupe. L'accord moteur-transmission ne mérite que des éloges et le comportement routier de l'Integra qui, rappelons le, possède une partie cycle de moto, ne prête guère le flanc à la critique.

Nous perdons vite l'envie de gérer le passage des rapports en mode manuel, sans grand intérêt: il nous semble plus intéressant de conserver le mode automatique en position Sport, quitte à intervenir ponctuellement sur les palettes à main gauche pour éventuellement forcer le passage d'un rapport lorsque le besoin s'en fait sentir. Une petite pause déjeuner à Brieulles-Sur-Bar, un des rares restos que nous croiserons sur notre route! A force de concocter des itinéraires sur les plus désertes départementales, nous finissons par galérer pour trouver de quoi nourrir hommes et montures!

Nous repartons sur la D982 en direction de Sainte-Menehoulde. C'est ici que furent reconnus Louis XVI et Marie-Antoinette le 21 juin 1791, lors de leur fuite des Tuileries vers les frontières de l'Est. Ils seront arrêtés non loin d'ici, à Varennes, avant d'être ramenés sur Paris dès le lendemain. Les lieux sont riches d'histoire, puisqu'un an plus tard, les révolutionnaires arrêteront l'invasion des armées austro-prussiennes à Valmy, une dizaine de kilomètres à l'ouest de Sainte-Menehoulde. La région se distingua hélas encore durant toute la durée du premier conflit mondial, de nombreux sites en témoignent jusqu'à aujourd'hui.

Cabanes perchées

L'objectif de notre randonnée se voulait heureusement plus paisible: passer la nuit dans une cabane perchée dans les arbres, au sud du Lac de Der-Chantecoq. Plus grand lac de France, il fut inauguré en 1974 pour réguler les cours de la Marne et de la Seine et éviter ainsi les inondations catastrophiques qu'a pu connaître Paris, à près de 200 km de distance. Nous quittons la D982 peu avant Vitry-Le-François et piquer verticalement vers le lac que nous contournons par l'ouest, quasiment sans le voir, caché qu'il est par plus de 20 km de digues.

Enfin arrivés, nous découvrons nos cabanes paumées au milieu des bois. Pas de sophistication technologique ici: ni eau, ni électricité! Nous posons nos affaires, exit le lourd équipement moto, nous récupérons nos montures abandonnées sur la route et partons manger un bout. Noir d'encre au retour, pas question d'abandonner nos motos n'importe où, nous décidons de les "planquer" sous une des cabanes perchées. Et nous voilà en pleine nuit à franchir un fossé avec l'intégra puis à slalomer entre les souches! Heureusement qu'il n'a pas plu ces derniers temps.

Terrain de jeux

380 km de départementales pour cette première journée, et après une nuit juchés à cinq mètres dans les arbres (nous, pas les motos!), et un petit déjeuner à hauteur des oiseaux, il est temps de nous préparer au retour, soit encore près de 400 km sur des petites routes aussi sympas que peu fréquentées, hormis par quelques engins agricoles et de temps à autre une improbable voiture, sans doute égarée. Le temps reste de la partie, meilleur que la veille en fait, avec une température ambiante calée entre 20 et 25°.

Les routes sont tellement paumées que nous ne croiserons qu'un contrôle radar, généreusement signalé par le convoi agricole que nous croisons au bon moment, sur une des rares départementales un peu plus fréquentées que nous emprunterons sur un demi kilomètre. L'Integra, toujours aussi plaisante, ne souffre nullement de la présence d'un top-case chargé, et nous continuons à jongler entre les deux modes automatiques au gré des circonstances, bercés par le jappement  viril de l'échappement Ixil, monté l'avant-veille du départ.

Dark Dog Moto Tour

Nous apprécions aussi notre petit pare-brise Givi: non content d'alléger la ligne de l'Integra, il supprime les turbulences générées au niveau du casque par la pièce d'origine. Certes moins protecteur en cas de pluie, il soulage suffisamment le buste et le cou de la pression du vent, assez en tous cas pour envisager de longues étapes avec sérénité. Mais le plus beau, c'est que le plaisir prodigué par cet Integra décidément à l'aise en toutes circonstances, y compris sur la route, comme l'a d'ailleurs prouvé à suffisance Benjamin Colliaux en remportant l'an dernier la catégorie "Scooter" du Dark Dog Moto Tour, ne s'est payé que par un modeste 3,3 L/100km de moyenne sur les 800 km de notre périple! Oui, oui, vous avez bien lu, trois virgule trois litres aux cent kilomètres, sans cesser de nous faire plaisir au guidon, sans retarder la 1200 GS ou la Ducati Hyperstrada qui nous accompagnaient! Elle est pas belle, la vie?

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