Édito : ces enfants à qui on s'attache (update)

Normalement c’était pour le 1^er mai. Ce sera finalement plus tard que les textes transposant la directive européenne imposant un système de retenue adapté pour les enfants de moins de 1,35 m seront prêts. Les contrôles, en tout cas, ne commenceront pas avant le 1er septembre. Concrètement, cela signifie que la ceinture de sécurité ne suffira plus pour les enfants. Ils doivent désormais être installés dans un siège adapté ou sur un rehausseur. Sauf à quelques exceptions, genre la voiture des grand-parents. Si le ridicule ne tue pas, un enfant court quand même trois fois plus de risque en étant mal attaché. On en reparlera de cette législation, une fois qu'elle sera publiée et mise en application

On pourrait croire que les parents soient conscients des risques qu’ils font courir à leur enfant lorsqu’ils conduisent. Et pourtant… il n’est pas rare d’en voir sur les genoux d’un des passagers, parfois même à l’avant. Ou bien d’en voir se balader sans aucune attache sur les places arrière. Quelques fois à cinq sur une banquette pour trois. Enfin, on en voit même transformés en valise puisque ces enfants sont « installés » dans le coffre comme de vulgaires sacs à patates.

Selon une étude récente, seulement 40 % des enfants sont attachés en voiture et seuls la moitié d’entre eux le sont correctement. L’âge critique semble être entre 7 et 9 ans où ils sont installés sans système adapté ou avec une ceinture derrière le dos ou mal réglée. De plus, avec la nouvelle directive, l’orgueil de certains risque d’être mis à mal puisqu’ils devraient, en principe, retrouver leur rehausseur. Cela va crisser des dents sur la banquette arrière.

Il semble évident que les adultes ne s’attachant pas en voiture ont tendance à faire reproduire cette négligence à leurs enfants. Il y a aussi ceux qui présentent la ceinture comme une punition « si tu n’es pas sage, papa va te mettre la ceinture ». Difficile ensuite de leur faire croire que la ceinture c’est pour leur bien. Alors qu’il est relativement simple d’en faire un réflexe.

La directive a un objectif louable. Mais son application risque de prendre du temps. En effet, le principal frein à l’installation d’un siège adapté, neuf et homologué sera le prix. Difficile de trouver un bon siège à moins de 100 euros. Et si on se laisse séduire par la norme Isofix, il faut compter 300 euros environ. Tout cela pour une durée de vie limitée puisqu’il faudra au moins en changer 3 fois en 10 ans pour l’adapter à la morphologie de l’enfant. Sans oublier le désintérêt des parents pour un tel équipement puisque 30 % des adultes ne bouclent pas systématiquement leur ceinture.

Le port de la ceinture semble être une question de liberté individuelle. Cela est vrai lorsque le chauffeur accidenté est seul à bord et qu’il est le seul impliqué dans l’accident qui lui coûtera la vie. Que dire lorsqu’il est accompagné et que les autres passagers le verront passer par le pare-brise ? Cette vision d’horreur restera gravée à jamais dans leur chair. Que dire aussi lorsqu’un passager arrière non attaché écrase celui qui se trouve devant lui. Car lors d’une forte décélération le poids est augmenté et un adulte devient un projectile mortel pour ceux qui se trouvent sur son passage. Enfin, imaginez un simple accident de circulation de refus de priorité. Un conducteur non ceinturé oublie la priorité de droite. Lors du choc, il décède. L’autre automobiliste, en droit, risque de mal vivre d’avoir été impliqué dans la mort de quelqu’un. Même si le code de la route lui donne raison. Avoir une mort sur la conscience est un poids lourd à porter, le restant de ses jours. Et que dire si une mère voit son enfant mourir sous ses yeux parce que mal attaché… Finalement, la ceinture concerne davantage les autres qu’on aurait pu le croire à première vue.

Les campagnes de sécurité routière sont relativement sages chez nous. Cela n’est pas toujours un échec, Bob en est la preuve. Mais pour la ceinture de sécurité et la sécurité des enfants à bord, il faudrait peut-être faire le pas que d’autres pays ont franchi. Montrer ce qui se passe dans une voiture lors d’un accident. Et pas uniquement avec des crash test dummies. Il faut des situations réalistes. Peu de gens, finalement, connaissent vraiment les lois physiques qui peuvent transformer un coup de frein ou une simple touchette en fait dramatique. Car rouler en voiture n’est pas un acte anodin. Merveilleuse machine, l’automobile est aussi une bête sauvage qui n’hésite pas à tuer son maître. Il faut donc savoir s’en protéger.

Photos : DaimlerChrysler et Volvo Cars