Bruno Wouters

24 OCT 2015

Can‑Am Spyder F3‑S: Mon gros jouet joufflu!!

Soyons clair, le Can-Am Spyder F3-S ne pourra prétendre jouer un autre rôle que celui de pur jouet, combinant avec brio l'encombrement propre aux voitures et le manque de protection inhérent aux motos! Pas très enthousiasmant, tout ça! Mais ça, c'est avant de l'avoir essayé!

Difficile à classer, le Can-Am, un produit du groupe canadien BRP (Bombardier Recreational Products), tient en fait plus de la motoneige que de la voiture ou de la moto. La légende urbaine prétend d'ailleurs que le Can-Am serait né d'une motoneige adaptée à la conduite sur route! Vrai ou faux, qu'importe, cela suffit définitivement à placer le produit en dehors des classifications habituelles deux ou quatre roues (fatalement, avec trois!!), déroutant autant le motard que l'automobiliste par le ressenti atypique de sa conduite.

Très bizarrement d'ailleurs, la conduite du Can-Am avec sa boîte manuelle (lisez: avec sa commande d'embrayage au guidon) exige la possession d'un permis moto, alors que le même engin avec sa boîte séquentielle (embrayage piloté, palettes au guidon pour monter et descendre les rapports) s'offre aux détenteurs du seul permis auto. Aberrations législatives, bonjour! Une bonne part du succès des Can-Am s'explique certainement par cette accessibilité aux permis B, touchant une plus vaste clientèle.

Avec de la technologie dedans!

Mais revenons à notre F3, qui partage avec le RT, solidement accastillé pour le voyage, le nouveau moteur trois cylindres en ligne élaboré par Rotax, une division du même groupe BRP qui possède aussi Ski-Doo, Sea-Doo ou Evinrude. Cubant 1.330 cc, il développe 115 ch à 7.250 trs/min, avec un couple de 130 Nm à 5.000 trs/min. Nous avons choisi d'essayer le F3 avec sa boîte SM6 semi automatique. Le passage se commande du pouce pour monter les rapports, l'index permettant de les redescendre. Si vous êtes distraits et oubliez de rétrograder, pas de panique, la boîte le fera pour vous! Mais pour les monter, à vous de bosser!

Pour le châssis, tubes en acier, train avant à doubles triangles superposés et barre stabilisatrice, amortisseurs Fox, bras oscillant en acier avec amortisseur Sachs. Le freinage est confié à trois disques de 270 mm avec pinces quatre pistons pour l'avant et simple piston pour l'arrière, le tout signé Brembo.

L'électronique, très inspirée du monde automobile, est fournie par Bosch: contrôle de stabilité, antipatinage, ABS, servodirection dynamique sont de la partie pour sécuriser la conduite du Spyder. Notons encore en vrac quelques caractéristiques, comme le coffre de 24 litres (aux formes un peu tarabiscotées!) dans le nez, la transmission finale par courroie ne nécessitant aucun entretien, ou le système UFit adaptant le F3 à votre morphologie via le réglage de la position des repose-pieds et le choix entre différents guidons. Bien vu!

Et ça roule comment?

Terminons ce tour d'horizon par quelques chiffres: largeur de 150 cm, longueur de 264 cm et poids de 386 kg à sec, soit sans doute pas loin de 420 kg tous pleins faits…

Motards, oubliez la moto! Hormis la position de conduite et le guidon entre les mains, la conduite du Can-AM n'a vraiment rien à voir avec celle d'une moto. La direction, bien qu'assistée, est beaucoup plus lourde, et ne réagit pas du tout de la même manière: pas question ici de léger contre-braquage pour faire plonger l'engin dans la courbe. Il faut tirer sur le guidon, forcer l'inscription, et difficile de gérer tout ça avec précision dès les premiers tours de roues.

Difficile aussi d'estimer la largeur du train avant lorsqu'on a l'habitude de se faufiler en deux roues entre les bagnoles! Mais le plus surprenant, et je n'ose pas imaginer les difficultés d'un éventuel passager, sera de lutter contre la force centrifuge qui n'a qu'une envie, vous faire valdinguer à l'extérieur du virage!

L'automobiliste, habitué à se trouver confortablement calé dans le cockpit de sa voiture, sera surpris par la position (et l'exposition aux éléments) du corps, équivalente aux deux roues, mais aussi à l'emplacement central, déroutant, et à l'absence de tout soutien latéral en virage. Les débuts risquent donc de se montrer un peu laborieux.

Enjoy!

Comme pour le ski, le patin à roulettes, la planche à voile ou le surf ou le monocycle, bref, tous ces machins pas évidents lorsqu'on débute, il faudra s'obstiner un minimum, mais le plaisir de conduire apparaîtra  bien vite! Car le Can-Am se révèle rapidement fun à conduire. Le triple, conciliant dès 2.000 trs/min, déchaîne toute sa hargne à l'approche des 4.000 tours, pour grimper avec vigueur vers la zone rouge.

Certes, l'enthousiasme sera vite maîtrisé par les aides à la conduite qui calment rapidement le jeu. Moins vite heureusement que sur les précédents modèles, particulièrement frustrants en ce domaine, mais cette assistance, très rassurante à l'usage, laissera sur leur faim ceux qui se sentent prêts à des sensations de conduite plus extrêmes. L'absence de tout choix en ce domaine évitera sans doute quelques débordements qui pourraient surprendre.

Réticent à priori à m'extasier sur ce type d'engin, je l'ai rendu avec regrets. Le réel plaisir qu'apporte sa conduite, si différent de celui que peut prodiguer une voiture ou une moto, justifie de facto son existence et son succès. Bon, pour les aspects pratiques, mieux vaut lorgner sur le plus logeable RT, mais pour le plaisir brut et les sensations, le F3 vous comblera, le F3-S ne s'en différenciant que par ses couleurs de guerre, plus affirmées, et quelques détails d'équipement ou de finition.

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