François Piette

25 MAR 2010

Alfa Romeo Montreal : La 8C des 70’s !

L’histoire est un éternel recommencement... Vers la fin des années 60, l’image d’Alfa Romeo est sur le déclin. Les produits commencent à être datés et le constructeur n’a plus de modèle prestigieux à proposer depuis belle lurette… Comme récemment avec la 8C, Alfa décide de reconquérir le cœur des amateurs en leur proposant une véritable et prestigieuse sportive. Après avoir présenté un concept à l’expo universelle de Montréal en 1967, Alfa décide de passer à la production, avec une véritable surprise sous le capot !

Marcello Gandini, en maître d’œuvre

Le dessin fût confié à Bertone et c’est le jeune élève Marcello Gandini qui s’occupa de tracer les lignes de la Montreal. Le résultat est sculptural… L’inspiration de la Lamborghini Miura est perceptible dans les prises d’air arrière et le design racé des portières ! On croirait presque une voiture à moteur central ! Le long capot accueille des prises d’air NACA (alors très à la mode) et les phares s’occultent sous des paupières qui ajoutent au charisme. A l’arrière, les feux rectangulaires sont soulignés d’une large bande noire, sous laquelle apparaissent les deux tromblons d’échappement. D’une beauté agressive, d’un charme envoûtant et d’une finesse insoupçonnée, ce dessin est à considérer comme un chef d’œuvre à part entière.

Moteur inattendu !

Enthousiaste, l’accueil du public aura finalement convaincu Alfa de passer à la commercialisation. Baptisant son modèle de série du nom de la ville qui a connu ses débuts, Montréal, Alfa se décide finalement de troquer le célèbre 4 cylindres double arbre de 1.6 l du prototype contre un moteur autrement plus noble… Et ce dernier est tout trouvé ! En compétition, le constructeur transalpin engage la 33, une véritable voiture de compétition au moteur V8 à 4 arbres de 2 litres. C’est ce moteur qui sera repris, mais dans une version forcément assagie et réalésée à 2,6 litres. Alors que la plupart des moteurs de l’époque confient leur alimentation à des carburateurs, Alfa s’en remet à une injection Spica, capricieuse, mais performante lorsqu’elle fonctionne ! Ainsi, ce ne sont pas moins de 200 chevaux qui déboulent en rang serré à 6.500 tr/min ! Le couple est annoncé à 235 Nm à 4.750 tr/min. Des valeurs très respectables pour l’époque et la cylindrée, mais qui se payent par une consommation assez conséquente, un entretien méticuleux et une relative paresse à bas régime. La boîte provient du manufacturier ZF, qui a fourni une unité manuelle à 5 rapports. Les performances annoncées méritent le détour : 220 km/h, le km départ arrêté en 28 secondes et le 0 à 100 km/h en moins de 8 secondes ! Des chiffres qui peuvent faire sourire aujourd’hui, car réalisables par une bonne berline turbo diesel… Mais pour l’époque, il s’agit d’un très bon niveau ! Pour ceux qui en voulaient encore plus, Autodelta, l’officine compétition – très – vaguement officielle de la marque, avait développé une version 3 litres de ce moteur. La puissance était alors estimée à plus de 220 chevaux, certaines sources parlant même de 250 chevaux !

Des dessous moins flatteurs

Si, au départ, il était question de construire un châssis spécifique, il en ira finalement autrement… En reprenant les soubassements du coupé Giulia, la Montréal trouve les limites de ce châssis conçu pour recevoir un 4 cylindres seulement. Le système de freinage est heureusement assuré par 4 disques, mais à l’efficacité datée aujourd’hui.

Au volant

Dans l’habitacle, l’ambiance est tout aussi typée « seventies », avec un combiné d’instruments situé droit sous les yeux et reprenant les multiples informations essentielles à la conduite et à la santé du moteur ! Le volant tulipé est cerclé de bois et le levier de vitesses tombe idéalement sous la main. Dès les premiers tours de roues, le moteur séduit par sa sonorité rageuse, son élasticité et sa nervosité. Capable de grimper dans les tours avec détermination en hurlant sa rage dans les deux échappements, il continue son répertoire lyrique en laissant échapper quelques sourdes détonations au lever de pied ! Quelle musique ! La boîte est plutôt virile et ses cinq rapports sont plutôt bien étagés… Hélas, mille fois hélas, la partie châssis n’est pas à la hauteur, avec des mouvements de caisse mal freinés et une rigueur assez aléatoire. Clairement, la Montréal n’est pas taillée pour la grosse attaque sur routes sinueuses !

Séduit ? Attendez ce qui suit…

Mal aimée et critiquée à l’époque pour son châssis daté, la Montréal a également été victime de la crise pétrolière : 3925 exemplaires auront été construits, en tout et pour tout, entre 1971 et 1974 ! Pourtant, la Montréal n’est pas très recherchée aujourd’hui et se trouve assez facilement sur le marché des véhicules de collection. Si sa cote de 15.000 à 25.000 € (selon état) peut paraître attractive, il faut toutefois être conscient des difficultés de maintenance d’une telle œuvre d’art. Ainsi, l’injection Spica de son moteur peut être à l’origine de bien des cauchemars et quelques unes ont même été converties aux carburateurs ! La rouille est un ennemi classique et l’électricité, en bonne italienne, peut se montrer fantaisiste ! Enfin, les pièces spécifiques sont forcément difficiles à trouver et le V8 demande des mains de spécialiste. Toutefois, ce dernier ne souffre pas de vice particulier et se révèle plutôt solide, si on le respecte à la conduite (temps de chauffe…) et à l’entretien.

Conclusion

Etoile filante dans le paysage automobile, la Montréal reste une mystérieuse inconnue aux yeux de beaucoup d’amateurs. Contrairement à sa descendante bien plus aboutie, la 8C, la Montréal aura souffert d’un contexte politico-économique défavorable et d’un châssis sous dimensionné. Aujourd’hui, on la redécouvre avec sa ligne magique et son superbe moteur…
 

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