Bruno Wouters

13 AOÛ 2009

Qu'importe le flacon…

C'est lors d'une conversation entre collègues et néanmoins amis qu'à germé l'idée d'une petite balade à moto dans les Vosges. Grâce à la complicité de l'importateur Yamaha qui proposa de mettre des motos à notre disposition, l'affaire fut rapidement mise sur pied. Et nous voici donc réunis un matin à Wauthier-Braine pour prendre les clés d'une FJR 1300 AS à embrayage automatique, d'une récente XJ6 Diversion, d'un Majesty 400 flambant neuf ramené en toute hâte d'Italie, et de deux valeurs sûres que sont la Ténéré et le Tmax.

Le temps particulièrement menaçant pronostiqué par les météorologues nous pousse à enfiler dès le départ des protections pluie fluo qui nous font ressembler à nos pandores et nous voilà partis direction Dinant par l'autoroute. Aucun problème pour croiser à 120-130 compteur, toutes nos machines disposent d'une allonge suffisante. La FJR est nantie d'origine de sa paire de valises, la Ténéré hérite pour l'occasion de ses deux valises disponibles en option, des boîtes cubiques aux arêtes vives, dont les faces recouvertes d'aluminium accentuent encore le côté "baroudeur" de la XT. La Diversion reçoit deux cavalières souples et un sac de réservoir aimanté, et chaque scooter voit un sac à dos ficelé sur la selle passager. La FJR se montre impériale, tout à fait à l'aise dans son élément, le grand tourisme. Excellent confort, bonne position, avec toutefois une bulle réglable provoquant de désagréables remous dans le casque lorsqu'elle est réglée en position haute. Basse, pas de problème, mais le buste est plus exposé.

Du mono au quatre pattes…

La Ténéré, haute sur pattes, vibre gentiment, comme un "gromono" peut le faire, mais offre également une excellente position de conduite, le buste bien droit et les bras écartés sur le large guidon type cross. Le petit pare-brise vertical dans le prolongement du phare soulage complètement le buste de la pression du vent, et l'on se sent, à son guidon, pousser des ailes d'aventurier prêt à sillonner la planète bleue d'un continent à l'autre. La Diversion montre elle aussi de bonnes capacités au voyage. Son moteur, plutôt coupleux pour un petit quatre cylindres, réagit avec naturel à la sollicitation des gaz, mais semble mouliner à notre vitesse de croisière, et on cherche désespérément à passer une 7ème voire une 8ème vitesse pour faire tomber le régime. La protection offerte par la carrosserie convainc moins que la Ténéré ou la FJR, mais laisse entrevoir de belles possibilités de voyage. Rien à dire sur le Tmax, que nous utilisons régulièrement dans le cadre de notre essai longue durée et qui confirme tout le bien que nous en pensons et sa parfaite polyvalence, mais qui nous fait pester contre la bulle qui provoque de bruyants remous dans le casque.

Le petit dernier

Le Majesty 400, la grande nouveauté de la bande, se pare d'une nouvelle robe d'un blanc immaculé, de quelques modifications de la transmission destinée à lui procurer des accélérations plus franches, de nouveaux maître-cylindres avec leviers réglables et la possibilité (option dont ne disposait pas notre Majesty) d'obtenir un ABS hérité du Tmax. Le remodelage récent du Majesty lui donne sans contexte un regard plus jeune, avec une double optique joliment travaillée, et une poupe reconnaissable entre mille, avec ses feux arrière formant un large V en led couvrant toute la largeur de la carrosserie. Tableau de bord complet mais sans charme particulier, vaste coffre capable d'engloutir deux intégraux sous la selle, rangement dans le tablier, les aspects pratiques n'ont pas été négligés. Certains d'entre nous, plus "robustes" ou plus longs sur pattes pestent pourtant à son guidon devant le peu de place ménagée pour leurs jambes, et se retrouvent avec les genoux dans le tablier. Pas très pratique pour braquer…

Je vous parle d'un temps…

Les météorologues se sont une fois de plus fourrés le doigt dans l'œil avec leurs prévisions et voici déjà près de 300km abattus depuis que nous avons quitté l'autoroute à hauteur de Dinant. Nous sillonnons donc des nationales et départementales parfaitement sèches et variées, qui permettent déjà d'y voir un peu plus clair. La Ténéré confirme ses aptitudes au voyage avec son confort remarquable et des capacités routières attachantes, ce qui nous rappelle une époque où les trails, se vendant comme des petits pains et se retrouvant dans toutes les cylindrées chez tous les constructeurs, faisaient le gros des chiffres de ventes. Haute sur pattes avec des grandes roues (21 à l'avant!), elle offre un comportement sain et prévisible qui n'empêche pas l'attaque. Nous tenons un rythme qu'il vaudrait peut-être mieux calmer pour la longévité d'un monocylindre, auquel il n'est pas raisonnable de demander des prestations d'un multicylindre, d'autant que les routes de France se montrent très surveillées par la maréchaussée: gendarmes vous fixant aux jumelles, break Mégane banalisé garé sur le bord de la route avec radar embarqué à l'arrière et à l'avant, …

Au petit jeu des comparaisons

Avec un peu d'habitude, nous commençons à bien apprécier l'embrayage automatique de la FJR, montant et descendant les vitesses d'un simple mouvement du bout de l'index: facile et rapide! Quand les routes tournicotent un peu plus, la FJR perd de sa superbe et se montre particulièrement lourde de l'avant, un ressenti dont nous ne nous souvenions pas lors de nos précédents essais. Le freinage, particulièrement puissant, fait aussi plonger l'avant de la moto de manière un peu déroutante, mais l'agrément du gros quatre pattes reste bien présent. La FJR Diversion se trouve dans son élément, pour peu qu'on se donne la peine de jouer de la boîte de vitesses, histoire de maintenir le petit 600 dans les tours. Le Tmax prouve avec insolence la justesse de son concept avec un comportement d'une rigueur exemplaire, un moteur volontaire, un réel confort, et une facilité de conduite étonnante. Le Majesty ferme la marche; disposant d'une belle allonge et de solides relances, il cède assez peu en performances face au Tmax, mais montre vite ses limites sur un parcours accidenté. Son comportement reste sain, mais la technique classique des scooters (ensemble moteur-transmission-roues oscillant) ne se prête guère à l'attaque à outrance. Un bon outil, mais pas une bête de course…

Low-rider attitude

Nous arrivons tous à bon port, malgré une "saucée" de 50km particulièrement mémorable, la pire, sans doute de notre expérience motarde. Le lendemain matin, notre parc se complète de la nouvelle Midnight Star XVS950A, arrivée sur une remorque, personne ne s'étant senti le courage de tailler la route à son guidon…Le programme de la journée s'annonce plus détendu, puisqu'il s'agit de parcourir une balade dans les merveilleux paysages vosgiens et alsaciens. Les caractères de nos machines se confirment, et la XVS950, un low-rider à la ligne élancée et aux nombreux détails joliment dessinés, démontre une aptitude à la promenade que nous n'attendions guère, au vu de la position de conduite très typée de ce genre d'engin. Assise très basse, pieds en avant sur de larges repose-pieds, guidon d'une largeur extrême, on ne se sent guère l'envie de suivre une bande de "furieux" sur les jolies routes du coin. Et puis… et puis le moteur montre un caractère plutôt sympa, mieux rempli que ce que nous attendions, avec en prime un comportement très sain, grâce à un châssis qui ne se désunit pas. Et nous voilà menant cette Midnight Star dans un complet contre emploi, à faire sursauter à chaque virage le collègue dont nous collions la roue par le fracas des repose-pieds qui liment le bitume, dans une belle gerbe d'étincelles!

Qu'est-ce que je vous sers?

Amusant, mais c'est confirmé, la position de conduite n'est guère reposante à la longue. La FJR, un peu pataude avec son lourd train avant, ne suscite pas trop l'enthousiasme sur les petites routes, mais paradoxalement, lorsqu'on la bouscule un peu et qu'on attaque à son guidon en enchaînant les franches accélérations et les freinages de trappeurs en entrée de virage, elle "le fait" tout à fait bien et on s'amuse franchement! À l'heure de l'apéro, les avis convergent et les deux valeurs sûres qui s'en dégagent se nomment Ténéré et Tmax, deux engins qui offrent un caractère bien attachant, chacun dans leur style. Vient l'heure du retour, et les météorologues prennent leur revanche: nous faisons les 450km du retour sous une pluie torrentielle… Chacun gardera la même monture sur tout le trajet, parcouru sur autoroute. Le pilote de la FJR se régale, celui du Tmax aussi. La Ténéré avale sans sourciller les kilomètres à 130, accompagnée par la Diversion dont la polyvalence laisse entrevoir tous les usages possibles à un coût raisonnable, et par le Majesty, qui surprend par ses capacités à sortir de la ville et de ses embouteillages pour goûter aux grands espaces. Sans surprise, la FJR a consommé en moyenne 6,79 litres, le Majesty 4,83, les autres se tenant dans un mouchoir avec 5,69 litres pour la Ténéré, 5,73 pour le Tmax et 5,78 pour la Diversion.

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